Revue Cliniques Juridiques > Volume 2 - 2018

L’enseignement de l’introduction au droit

La présente contribution est la publication d’une conférence faite dans le cadre du séminaire de l’UMR 7318 DICE1. Le style informel en a été conservé. Bien qu’intervenant dans un cadre de recherche, il faut en préalable préciser qu’il ne s’agit pas ici de faire état du fruit de recherches menées sur l’enseignement de l’introduction au droit. Mes seules recherches en la matière sont celles faites sur « le contenu des introductions au droit », à l’occasion du cycle de conférences organisées par R. Cabrillac autour du thème « Qu’est-ce qu’une introduction au droit ? »2, et qui constituent la base du présent propos. Il s’agit dès lors plutôt d’un retour d’expérience, en tant qu’enseignante et auteur d’un manuel dans cette matière. Cette précision liminaire faite, il est possible de revenir sur l’origine de cet enseignement (I.), le contenu actuel des manuels en la matière (II.) et les contraintes qui pèsent sur cet enseignement (III.) et qui expliquent le décalage pouvant exister entre l’idéal que l’on peut nourrir sur cette matière et sa faisabilité, lorsque l’on s’adresse à des étudiants de première année.

I. Origine

L’origine sera ici rapidement évoquée. Il est possible de prendre pour point de départ3 l’ordonnance du 25 juin 1840, qui a créé une chaire d’introduction générale à l’étude du droit, sous l’influence de Victor Cousin, un philosophe. L’idée est alors d’introduire à l’étude du droit par un enseignement très ouvert à la philosophie, à la morale, au droit naturel et aux autres sciences. Au 19e siècle, quelques cours d’introduction générale au droit de cette inspiration sont publiés4 : leur contenu révèle l’importance accordée à l’histoire du droit, le grand intérêt porté aux autres sciences, notamment dans la formation (quelles sont les autres sciences auxquelles il faut être formé pour pouvoir entreprendre des études de droit ?) ou encore l’attention portée au droit comparé. L’approche est ainsi assez philosophique et générale. On trouve encore ces éléments dans les introductions du droit actuelles (de l’histoire du droit, un peu de droit comparé, un tout petit peu de rapport du droit avec les autres sciences) mais il s’agit de faibles traces par rapport aux ouvrages du 19e qui viennent d’être évoqués. Selon moi, ce ne sont toutefois pas ces premiers ouvrages qui vont marquer la tradition actuelle d’enseignement de l’introduction au droit.

Cette tradition semble en effet plus marquée par d’autres ouvrages publiés au 19e siècle, à commencer par les traités exégétiques qui, fidèles à cette méthode, enseignent le droit civil en suivant les articles dans l’ordre du code. Ces traités commencent dès lors par les 6 premiers articles du Code civil, qui en constituent le Titre préliminaire sur la publication, les effets et l’application de la loi. L’étude de ce titre préliminaire, si l’on prend l’exemple du traité de Demolombe, constitue les 150 premières pages du Cours de Code Napoléon5 sur la loi, l’interprétation de la loi, l’application de la loi, la promulgation de la loi. Au début de ces développements, sont également étudiées des questions qui ne figurent pas dans le Titre préliminaire mais étaient abordées dans le projet de ce titre, sur le droit et les lois, développements qui consistent essentiellement à distinguer le droit positif, le droit naturel et la morale. Si l’on trouve encore aujourd’hui, dans les introductions au droit contemporaines, beaucoup de développements sur la loi, son interprétation, son application dans le temps etc, c’est à mon avis dans le prolongement de cette tradition. Cette origine supposée est très importante. Elle ne l’est pas en ce qu’elle expliquerait aujourd’hui encore le plan ou la délimitation des enseignements d’introduction. Aujourd’hui, aucune introduction ne justifie son plan général ou la délimitation de la matière par référence au plan du Code civil – encore que cette justification du plan de l’ouvrage par l’ordre du Code civil se trouvait toujours dans le Précis Dalloz en 1973, alors sous la plume de A. Weil et intitulé Droit civil. Introduction. Si les auteurs contemporains sont probablement très éloignés de cette démarche intellectuelle, cette origine supposée pourrait en revanche expliquer pourquoi l’enseignement de l’introduction au droit a été, et est toujours, monopolisé par les civilistes : l’introduction au droit était enseignée au début de l’enseignement du droit civil, parce que ces éléments figuraient au début du Code civil. Pourtant, par leur objet, ces premiers articles ne sont pas particulièrement civilistes, loin de là. Mais la conjugaison de leur emplacement dans le Code civil et de la méthode exégétique pourrait avoir abouti à cette emprise des civilistes sur la matière.

Enfin, à la fin du 19e siècle, H. Capitant publie une Introduction à l’étude du droit civil : notions générales6. L’auteur explique son projet : il critique la méthode exégétique et défend la méthode allemande. Il veut proposer le premier enseignement du droit civil suivant cette méthode, qui commence par une partie générale, dont le but est d’exposer tous les éléments communs au droit civil ; une fois ces éléments communs maîtrisés, il est possible de s’atteler à l’étude des éléments particuliers et spécifiques de toutes les branches du droit civil. Dans le cadre de cette volonté de construire une théorie générale du droit civil, Capitant explique que les éléments communs du droit civil sont : les notions et divisions des droits civils (patrimoine, droit réel, droit personnel) ; les personnes ; les choses et les biens ; les faits et actes juridiques ; la preuve.

Finalement, si l’on regarde les introductions au droit contemporaines, on retrouve toujours ces éléments : les éléments qui sont nés de l’étude du Titre préliminaire du Code civil et les éléments qui constituent la théorie générale du droit civil. La perspective est toujours la même : il s’agit de préparer à l’étude du droit. Ainsi, on se prépare à l’étude du droit soit par celle des premiers articles du Code civil et plus largement des lois, soit par l’étude du socle commun de la théorie générale du droit civil. Comment se retrouvent ces origines dans le contenu des manuels contemporains ?

2. Les contenus

Si l’on consulte les introductions au droit contemporaines, il est possible de retrouver un socle commun de questions abordées assez clair : se retrouvent toujours le droit naturel et son rapport au droit positif, le droit et la morale, la définition du droit, un peu d’histoire du droit, les divisions du droit, les branches du droit, et toutes les questions relatives à la loi. Il est possible d’y ajouter, parmi les éléments de la théorie générale du droit civil, la preuve. Tous ces éléments se trouvaient déjà au 19e siècle. En revanche, les développements, au-delà de la loi, sur toutes les sources du droit, ont explosé7. Enfin, la préoccupation contentieuse des auteurs s’est considérablement renforcée : si la preuve est systématiquement abordée, le juge et le procès le sont également, dans des proportions toutefois très variables. Ce socle commun se retrouve dans toutes les introductions au droit, mais pas à l’identique. Les différences tiennent aux conceptions des auteurs sur ces différents sujets, mais aussi, ce qui est lié, à la part qui est accordée aux différents développements : la jurisprudence peut être traitée en deux pages ou en quarante, les sources internationales et européennes peuvent être traitées en une demi-page ou en quarante. Sur le socle commun, il s’agit donc plus d’une question de proportions que de thématiques.

Au-delà de ce socle, il existe une différence structurante parmi les manuels d’introduction au droit entre ceux qui, dans le prolongement du 19e siècle, introduisent au droit et au droit civil et ceux dans lesquels on ne trouve pas plus, ou pas spectaculairement plus, de droit civil que d’autres branches. Il est possible de regarder comment ces choix sont justifiés par les auteurs, dans les préfaces ou propos liminaires des manuels.

Dans les introductions au droit et au droit civil, qui sont les plus nombreuses, la justification est de trois ordres. La première est simple, rapide mais extrêmement importante : l’usage. Ainsi, Jean Carbonnier ouvre son introduction par ces mots : « Il est d’usage qu’une introduction à l’étude particulière du droit civil puisse valoir, de surcroît à l’étude générale du droit »8. Cette explication par l’usage se retrouve dans d’autres introductions au droit : la question du contenu de l’enseignement ne se pose pas, puisque l’usage est d’introduire au droit par l’introduction au droit civil et on sait comment le phénomène de répétition, et d’habitude acquise par la répétition, est un phénomène important. La deuxième justification légitime l’usage : si l’introduction au droit civil sert à introduire au droit, c’est parce que la matière constitue le modèle du droit. Carbonnier, toujours, poursuivait ainsi :

« C’est que le droit civil a dans sa vocation traditionnelle d’offrir des modèles aux autres disciplines juridiques. Non pas nécessairement qu’il ait le domaine d’application le plus considérable : (…) Mais ce qui reste vrai, c’est qu’il présente le plus haut degré d’achèvement et, si l’on veut, de perfection : Fondamentalement, d’abord, parce qu’il répond le plus purement à l’image que l’on se fait de l’essence du droit, équilibre imposé d’en haut à deux individus, balance aux mains d’une déesse ; Techniquement, aussi, parce que, plus ancien, il a approfondi davantage ses concepts, si bien que les autres disciplines juridiques n’ont pu mieux faire que de les lui emprunter ensuite »9.

La troisième justification est un peu différente. Elle correspond à un modèle d’introduction au droit qui ne prétend pas forcément introduire au droit civil – mais qui va quand même revenir à cette matière. Se présentant parfois comme des introductions générales au droit, elles vont expliquer en propos liminaires qu’il existe deux grandes définitions du droit : le droit objectif et les droits subjectifs10. Comme il s’agit des deux définitions du droit, elles vont devenir les deux parties de l’ouvrage – étant rappelé que les développements sur les droits subjectifs vont essentiellement ramener au droit civil, puisque les droits subjectifs permettent d’amener les catégories, les distinctions et les grandes notions du droit civil. Ainsi, la base des études de droit commence par la compréhension du droit, qu’il soit abordé par le haut du droit objectif ou par le bas des droits subjectifs. Cette dernière conception est toutefois contestée par plusieurs introductions au droit, notamment celle de J.-L. Sourioux11, celle de R. Encinas et Munagorri12 mais aussi celle de Ph. Malaurie et P. Morvan, dans laquelle on ne retrouve que quelques pages sur les droits subjectifs13. Le balancement ne se retrouve pas non plus dans mon introduction au droit : ayant déjà par le passé expérimenté l’enseignement de l’introduction sous cette forme, elle ne m’a convaincue ni pédagogiquement, ni scientifiquement14. Il y a probablement là un vrai clivage entre juristes de droit privé, selon l’importance que l’on accorde aux droits subjectifs en tant que clé d’explication du droit. Pour l’anecdote, l’un des collègues de mon université, également co-auteur d’une introduction au droit, à deux reprises, m’a félicitée pour mon introduction au droit en rajoutant à chaque fois qu’il était dommage que je ne l’ai pas terminée. Lui ayant répondu qu’elle était pourtant finie, pas parfaite, mais finie, il me répondait qu’il manquait pourtant la partie sur les droits subjectifs. Essayant d’expliquer qu’il s’agissait d’un choix, il apparaît rapidement qu’il est impossible de se comprendre. Par exemple, lors de cette même discussion, il me fut opposé selon lequel, sans les droits subjectifs, le droit présenté est totalement désincarné car coupé de son contentieux et des procès ; j’y répondais qu’il est possible de parler des procès sans passer par le biais des droits subjectifs mais, l’un comme l’autre, nous ne parvenions pas à comprendre la conception opposée. La différence de prisme est donc réelle et très importante.

Les introductions « générales » au droit, quant à elles, sont plus ou moins générales mais essaient de ne pas partir du droit civil et des droits subjectifs qui en sont les catégories fondamentales. Ce fut mon parti, notamment pour deux raisons. La première est que, tout en étant convaincue sans la moindre hésitation que le droit civil a été très structurant de notre tradition juridique, je suis plus dubitative sur la capacité du droit civil à permettre de comprendre notre droit tel qu’il est depuis la Seconde Guerre mondiale, depuis que nous avons développé des droits fondamentaux et depuis que nous avons développé du droit au niveau supra national : ces nouveaux éléments ne reposent plus sur les mêmes logiques, les mêmes concepts, les mêmes raisonnements et n’introduire que par le droit civil risque d’occulter tout un droit qui s’est développé aujourd’hui. Dès l’origine, le rattachement au droit civil de nombreuses questions liées à la loi en général a semblé essentiellement tenir à leur localisation au sein du titre préliminaire du Code civil plutôt qu’à une appartenance logique à la matière. Or, il me semble que l’artifice se creuse à mesure que les développements sur les sources du droit s’amplifient dans les introductions. La seconde, qui est plus pédagogique, est une réponse à la question « à quoi sert l’introduction au droit ? ». Le droit civil reste un enseignement très important pour les études de droit mais aujourd’hui ce droit est enseigné de façon totalement éclatée entre un nombre de spécialités considérables. L’étude du droit est plus largement tronçonnée en petits morceaux et mon impression en tant qu’enseignante était que les étudiants avaient du mal à mettre tous ces petits morceaux dans un cadre général, à avoir une vision générale dans laquelle chacun pouvait venir mettre son morceau de droit. L’utilité aujourd’hui d’une introduction générale au droit pourrait être de fournir ce cadre général, pour que, lorsque les autres enseignants abordent ensuite leurs matières, les étudiants sachent situer les différentes spécialités, les différentes questions, les différents enjeux les uns par rapport aux autres et en nourrir une compréhension générale de l’ensemble. Il est toutefois extrêmement ambitieux de tenter de présenter un cadre général qui puisse aider à la compréhension aussi bien du droit civil que des développements plus récents comme les droits fondamentaux : on se rend alors compte qu’il faut concilier son projet avec les contraintes qui pèsent sur l’introduction au droit.

3. Les contraintes

Les contraintes sont extrêmement nombreuses. Il est toujours possible de choisir de s’en libérer pour s’en tenir à sa conception idéale de l’introduction. Encore faut-il y arriver.

La première contrainte est celle du public, celle des étudiants de première année, qui n’ont eu aucun cours de droit. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas faire avec eux des choses extrêmement compliquées intellectuellement, mais cela veut dire, en tout cas pour moi, qu’il faut qu’à la fin du cours d’introduction au droit, ils aient des repères, qui permettront, quand les autres cours vont commencer, de bien situer l’ensemble. Là encore à titre d’anecdote, pendant la rédaction de mon manuel, j’ai testé les deux premières années, sur mes étudiants stéphanois, un plan qui était le plus fidèle à ce que je voulais faire intellectuellement. Le plan était totalement chronologique et essayait de montrer, pour chaque grande période de notre histoire du droit, comment cette période était reliée aux grands courants de philosophie et théorie du droit, qui n’ont pas par hasard été à un moment plus naturalistes et à un autre positivistes, aux réflexes de raisonnement ou aux grandes notions apparues à ce moment là, ce que l’on a conservé aujourd’hui de ces périodes ou que l’on n’a pas conservé mais que l’on retrouve dans des systèmes étrangers. Le tout était très axé sur la relativité du droit et le fait que les manifestations juridiques comme leur analyse sont souvent liées au contexte de leur apparition. Deux ans d’enseignement de l’introduction au droit sur ce mode : deux promotions d’étudiants stéphanois sacrifiés. En cours, tout se passait bien, les échanges étaient passionnants, les étudiants sortant de terminale et étant réceptifs à la philosophie et à l’histoire. Mais, une fois venu l’examen, je me rendais compte qu’ils mélangeaient les solutions du droit positif et ce qui relevait du passé, et que j’avais généré ces confusions à force de vouloir leur montrer comment les éléments conservés aujourd’hui étaient nés dans un certain contexte. C’est après l’abandon de cette démarche que j’ai absolument voulu leur donner des repères, même si le propos devait être moins satisfaisant intellectuellement.

Une autre contrainte est celle de la spécialité. Elle se sent évidemment dans les introductions au droit civil, même celles qui se veulent très générales : par exemple, on trouve très souvent un développement sur les juridictions, mais qui ne va traiter que les juridictions judiciaires ; aussi souvent, le développement sur la preuve ne va traiter que de la preuve en droit civil. On a beau faire tous les efforts, et tous les auteurs d’introduction au droit le font, pour dépasser notre spécialité et avoir une vue plus globale, la démarche a ses limites. Pour ma part, je n’ai pas ménagé pour essayer d’introduire des éléments de droit public, international, européen et au-delà de toutes les branches. Et pourtant, lorsque j’ai siégé dans le jury d’agrégation de droit public, je me suis rendu compte de l’absence de toute référence à la puissance publique ou au service public dans mon ouvrage. Pire : il a été impossible de le rajouter dans un propos qui n’avait pas été pensé à cette fin. Je n’ai trouvé aucun endroit approprié pour greffer un tel développement, pas même un passage un peu substantiel sur l’intérêt général. Il faut ainsi avoir conscience que, si l’on veut faire une vraie introduction générale au droit, il faut maîtriser les fondamentaux de toutes les branches du droit, mais aussi l’histoire du droit, le droit comparé, la philosophie du droit, un peu de sociologie et d’économie… et il faut tout remettre à jour tous les deux ans. Il y a ainsi des limites aux capacités d’un auteur. Il reste alors l’option de tronçonner, en faisant en première année une introduction au droit privé, une introduction au droit public, une introduction historique au droit, comme le font certaines facultés (ex. Toulouse, Versailles). Mais cela implique que l’on renonce à l’idée qu’il peut y avoir une présentation commune au droit, perçu comme une notion en soi, au-delà des principales divisions. Sinon, il faut accepter qu’il y ait des limites liées aux compétences.

Une dernière contrainte très importante est celle des maquettes. Déjà, il n’est pas sûr que les introductions au droit généralistes existeraient aujourd’hui si les maquettes n’avaient pas commencé à isoler le cours d’introduction du premier cours de droit civil. Lorsque j’étais étudiante, il n’y avait pas de cours d’introduction au droit mais le premier cours de droit civil commençait par aborder rapidement ces éléments. Certaines facultés ayant séparé le cours d’introduction du premier cours de droit civil, les manuels ont commencé à se libérer un peu. Mais il existe d’autres contraintes générées par les maquettes. Si l’on estime que l’introduction générale au droit est là pour servir les autres cours, il faut tenir compte de ces autres cours et être attentif à ce qui sera utile pour bien situer les autres matières. Enfin, il y a pire : l’introduction générale au droit sert de réceptacle à ce qui n’est pas traité ailleurs. Le fait de continuer à enseigner la preuve en introduction générale au droit n’a aucun sens, à part le fait que, si on ne l’enseigne pas à cet endroit, les étudiants ne le verront jamais. Cela n’a aucun sens pédagogique non plus d’enseigner les conflits de lois dans le temps à un étudiant qui n’a jamais fait de droit, qui ne peut pas vraiment comprendre les enjeux de ces questions, mais elles ne sont traitées nulle part ailleurs. C’est ainsi que l’on inclut des développements qui ne relèvent pas nécessairement, intellectuellement ou pédagogiquement, de l’introduction générale au droit, mais qui doivent être vus. Enfin, puisqu’il s’agit également d’une question de maquette, il est possible de signaler la façon dont l’introduction générale au droit est enseignée à l’Université Lyon 3. Le cours se fait en pré rentrée, tous les jours sur 10 jours, à partir de fin août ou début septembre. Les étudiants n’ont que ce cours : 3 h de CM par jour et un TD de méthodologie tous les deux ou trois jours. Une fois que ce premier enseignement est terminé, tous les autres cours commencent. Le retour des étudiants est qu’ils ne sont pas perdus quand les autres enseignements débutent, notamment parce qu’ils ont le vocabulaire et les notions juridiques de base. L’autre objectif de cet enseignement en pré rentrée était de permettre aux étudiants de très vite prendre conscience de la difficulté des études de droit, avec un examen terminal passé dans la foulée et un dernier TD de méthodologie après l’examen, pour leur rendre leur première copie d’examen, qui est souvent une claque. Malheureusement, des contraintes administratives ne permettent plus de faire l’examen si rapidement : il a lieu mi-octobre, ce qui est déjà un peu tard pour se réorienter ou rattraper des problèmes de méthode de travail. Dernières précisions : sur les six amphithéâtres de première année Licence Droit à Lyon 3, trois cours d’introduction au droit sont enseignés par des privatistes, deux par des publicistes et un par un historien. Enfin, aujourd’hui, j’enseigne ce cours à partir des questions que posent les étudiants en amphithéâtre. Je me suis rendu compte que tout mon projet intellectuel et pédagogique fonctionnait d’autant mieux que je le faisais en passant par ce qui interpelait les étudiants. Il est toujours possible de ramener les questions qu’ils se posent à des explications de base, qui relèvent de l’introduction, et ils comprennent et retiennent d’autant mieux que ces connaissances partent de leurs questions, qui sont souvent liées à l’actualité et à la Justice.

Notes

  1. https://dice.univ-amu.fr/fr/dice/dice/videos-lumr-dice. Tous nos remerciements vont à Marthe Fatin-Rouge Stefanini et à Sandrine Maljean-Dubois, d’une part, pour leur invitation à participer à ce beau séminaire, d’autre part, pour leur autorisation pour la présente publication.
  2. Dalloz, coll. Thèmes & Commentaires, 2017.
  3. Pour les Institutes du droit romain comme premier modèle des introductions au droit, v. C. Jallamion, « Une histoire des introductions au droit : des Institutes à l’ « introduction générale » », in Qu’est-ce qu’une introduction au droit ?, R. Cabrillac (dir.), préc., p. 13.
  4. Ex., P.-L.-A. Eschbach, Cours d’introduction générale à l’étude du droit ou Manuel d’encyclopédie juridique, N. Delamotte, 1845.
  5. A. Durand, 1845.
  6. A. Pedone, 1898.
  7. Sur ce constat, son explication et ses implications, v. P. Ancel, « Les manuels d’introduction au droit : de Capitant à la période contemporaine », Histoire des manuels de droit, A.-S. Chambost (dir.), LGDJ, coll. Contextes, 2014, p. 133
  8. J. Carbonnier, Droit civil. Introduction, 27e éd., PUF, 2002.
  9. Ibid.
  10. Ex. Ch. Larroumet et A. Aynès, Traité de droit civil. Tome 1. Introduction à l’étude du droit, Economica, 6e éd., 2013.
  11. J.-L. Sourioux, Introduction au droit, PUF, 2e éd., 1990, sp. § 54.
  12. R. Encinas de Munagorri, Introduction générale au droit, Champs université, 3e éd., 2011, sp. p. 16.
  13. Ph. Malaurie et P. Morvan, Introduction au droit, LGDJ, 6e éd., 2016, sp. §§ 50-55.
  14. Introduction générale au droit, Manuel LGDJ, 4e éd., 2017, § 58.